Coup d'œil dans le rétro
Par GIOM
Je dis souvent que j'ai eu la chance d'être entouré de potières et potiers généreux au début de mon parcours. Il était donc temps de parler un peu d'eux en jetant un coup d'œil dans le rétroviseur !
Tout commence par une rencontre…
J’habitais alors dans le Périgord, dans un petit village situé tout proche de la grotte de Lascaux, entre Montignac et Terrasson-Lavilledieu.
Dans cette ville, de nombreuses échoppes d’artistes et artisans sont installées dont l’atelier de Julie Z, potière céramiste. Julie tourne le grès et réalise de la céramique utilitaire contemporaine, avec une sensibilité et une légèreté qui m’ont fasciné. Découverte lors d’un marché de créateurs, puis dans son atelier, j’avais craqué pour l’une ou l’autre de ses créations jusqu’à ce que ma compagne m’offre pour Noël un bon pour une initiation. (Pour découvrir l’univers de Julie Z, c’est par ici !)
J’ai d’abord laissé trainer ce bon plusieurs mois avant de prendre le temps de contacter Julie pour fixer cette initiation. Et de cette première initiation, j’ai eu envie de poursuivre la découverte chaque semaine avec un cours hebdomadaire. Mais j’étais encore bien loin d’envisager autre chose qu’une activité de détente et de loisirs !
De la rencontre au coup de pied au derrière !
Au fil des semaines, ce cours hebdomadaire était mon rdv régulier avec Julie, et j’ai pris de plus en plus de plaisir à découvrir l’univers de la céramique.
Et puis, petit à petit, l’idée de dépasser l’activité de loisirs a germé. D’abord doucement. Puis plus fortement. Que j’ai refoulée en me disant que c’était irréaliste. En doutant de mes compétences et sans réellement savoir si les bidouillages hebdomadaires méritaient de l’attention ou étaient un tant soit peu prometteurs !
Etant dans une période compliquée, en transition professionnelle et en reconstruction personnelle, il était “facile” de se jeter sur la première activité un peu valorisante en s’y accrochant comme à une bouée de sauvetage, en prétextant y trouver un investissement pour l’avenir. J’ai donc eu besoin de laisser passer plusieurs mois avant d’oser aborder le sujet avec Julie.
Je me souviendrai longtemps de ce cours où j’avais prévu de demander son avis à Julie sur la possibilité pour moi d’explorer la céramique comme activité professionnelle.
Je me souviendrai également longtemps des minutes qui défilaient plus lentement que d’habitude et pendant lesquelles je ne trouvais pas la force ou le courage de poser ma question et d’engager la conversation. Je me souviendrai longtemps de mon départ penaud de l’atelier après le cours, en me disant que “j’oserai lui en parler la semaine prochaine” !
Et puis, n’y tenant plus, j’ai fini par lui envoyer un message tardif le soir-même ! En prenant toutes les pincettes nécessaires tellement mon syndrome de l’imposteur était envahissant. J’avais la désagréable sensation de prétendre être meilleur ou plus doué que ses autres élèves, et la forte inquiétude qu’elle croit que mon intention était, dès le début, de venir “piller” ses techniques dans le but d’en faire mon métier.
Julie a alors été merveilleuse et m’a donné le coup de pied au derrière dont j’avais besoin, comme une validation extérieure mille fois plus légitime à mes yeux que mes envies, mes ressentis ou mes aspirations : oui, elle trouvait que je me débrouillais bien et que je captais plutôt aisément la manière d’approcher la terre. Oui, elle me trouvait appliqué. Oui, elle pensait que si je le voulais, il pouvait être intéressant d’aller plus loin et de regarder pour des formations plus poussées. Il était donc temps d’explorer toutes les possibilités pour accéder à une formation professionnelle.
En passant par la Lorraine…
Certes je n’avais pas mes sabots (oui elle était facile mais je devais la faire !), mais mes recherches m’ont rapidement orienté vers le CPIFAC, situé juste à côté de Nancy.
Nous étions alors en Décembre 2017 et j’ai passé quelques jours au Centre Professionnel International de Formation aux Arts Céramiques, pour un stage de positionnement qui devait confirmer le sérieux de ma démarche ainsi que l’adéquation de mon état d’esprit avec celui du centre, mais également me permettre de confirmer mon choix. J’y ai découvert un univers merveilleusement créatif, peuplé de créatures plus habitées les unes que les autres et au service de la terre et des arts du feu, encadrées par une fée en chef (à moins qu’il ne s’agisse d’une sorcière lumineuse) en la personne de Céline LAURENT DESOR. Lors de ce stage de positionnement, qui avait pour thème la sculpture squelette, j’ai côtoyé les stagiaires en formation longue, plus inspirantes les unes que les autres, et pris tout ce que je pouvais prendre des cours délivrés par Hélène TARDY, aussi exaltée qu’elle était passionnante, aussi dynamique que captivante !
Pour tout un tas de raisons, ce n’est finalement pas au CPIFAC que j’ai bouclé ma formation, mais un peu plus à l’ouest !
… pour aller en Bretagne !
Un coup de pouce inattendu !
Alors que la plupart des formations professionnelles en poterie céramique étaient déjà complètes et qu’on me proposait systématiquement de postuler pour la prochaine session qui débuterait plusieurs mois plus tard, une place s’est libérée en dernière minute à Créamik, une école qui avait retenu mon attention pour son approche libre et atypique.
Nous étions alors fin janvier 2018 et le programme de ma journée était chargé, ne me permettant pas d’être très réactif avec les appels reçus sur mon portable. A midi, en consultant mon répondeur, un message datant du matin me proposait de rappeler l’école au plus vite, pour confirmer mon intérêt pour une place qui venait de se désister. Un second message, déposé quelques heures plus tard, me demandait de ne pas tenir compte du premier message, la place ayant été attribuée à quelqu’un qui avait été plus réactif. Enfin, en reprenant mon téléphone le soir-même, je découvrais un troisième message m’indiquant que la personne n’avait finalement pas pu confirmer sa présence. En rappelant l’école, j’apprenais avec bonheur que la place était donc bien libre, je confirmais immédiatement mon intérêt.
Je n’avais aucun financement assuré, il me fallait trouver un logement sur place, il me restait moins de 15 jours pour m’organiser mais je confirmais mon accord : je débuterai au mois de février une formation professionnalisante de plusieurs mois au sein de l’école Créamik. Joie et bonheur immense !
Une formation technique comme base pour développer ma créativité.
Dans mes recherches de formation professionnalisante, plusieurs hypothèses cohabitaient souvent : était-il préférable de privilégier une formation artistique, pour explorer et apprendre la création que je souhaitais faire, ou plutôt de m’orienter vers une formation technique pour approcher la matière. C’est cette seconde option qui s’est présentée à moi… et je ne regrette pas de l’avoir saisie !
Car mon esprit cartésien apprécie de pouvoir ancrer une pratique de création sur des fondations solides, en lien avec la matière, ses possibilités techniques, ses propriétés chimiques et physiques, ses limites, ses comportements dans différentes situations, etc. C’est en ayant la connaissance suffisante sur ces sujets que j’arrive plus aisément à explorer ma créativité et inscrire mes recherches dans un cadre.
Et c’est exactement ce que proposait la formation dispensée à Créamik par Matthieu LIEVOIS, aussi passionné qu’il est grand, aussi généreux qu’il est tête en l’air, aussi expérimenté qu’il est sympathique. Tournage, coulage, fabrication et pose des émaux, fabrication de moules en plâtre… voici en très rapide résumé ce que j’ai pu aborder pendant cette formation complète et très concentrée. Au final, ce parcours m’a permis de confirmer mon envie d’en faire mon métier, tout en prenant conscience progressivement des réalités du secteur et en mûrissant mon projet.
Un énorme merci empli de gratitude à ces professionnels passionnés, généreux et avides de transmission que sont Julie, Céline, Hélène, Matthieu et les autres, qui ont fait que je peux aujourd’hui exercer mon art avec, je l’espère, autant de passion qu’eux. Il était donc temps pour moi de trouver un lieu pour m’installer et c’est à Motoco, en Alsace, que j’ai tenté ma chance… mais ceci sera l’objet d’un prochain article 😉
